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31 août 2013 6 31 /08 /août /2013 10:00

   Attention, humour noir 

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-Non, avant c’était une vieille dame qui habitait là. Oh, quelqu’un de très bien ! . Elle faisait de la broderie pour ses petits enfants. Ceux qui habitent à Dijon ; les autres, ils ne venaient jamais. De la broderie, oui. Sauf à la fin. Elle n’y voyait plus très clair. Ah! La tête reste intacte, mais le corps ne suit plus, voyez-vous. C’est triste de vieillir.

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-Deux mois. Ils ont aménagé il y a deux mois, c’est cela. Un petit couple bien sympathique. Toujours un bonjour, dans l’escalier. Quelques conversations par-ci, par-là, mais rapides, forcément.

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-Ah non. Non, la première fois j’ai monté toutes les marches, vingt-sept au total, pour leur demander de faire un peu moins de bruit. Ils se sont excusés, ils m’ont dit qu’ils allaient faire attention. Ils m’ont même offert un café. J’ai refusé. A mon âge, le café, ce n’est pas trop conseillé. Je suis redescendue, doucement, j’ai pris mes somnifères et je me suis endormie, avec mon chat. Il s’appelle Gaston –je lui ai donné le nom de mon défunt mari- une brave bête, allez ! On a bien raison de dire que les animaux ne vous trahissent jamais. Et un poil si doux ! Il faut dire que je lui donne la meilleure nourriture : des petits plats que je mitonne moi-même. Mon mari aussi aimait beaucoup mes petits plats. Cher Gaston !

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-Ah oui, les voisins. Nous dormions tranquillement Gaston et moi…et soudain, j’ai été réveillée par des cris. Oh, terribles ! J’ai cru qu’on était en train de la tuer. Puis je me suis aperçue que non. Je connais la vie, quand on crie « encore », c’est qu’on n’est pas en train de se faire assassiner. Vous voyez ce que je veux dire. Je me suis demandé si elle n’exagérait pas un peu. Moi, avec Gaston, je n’ai jamais crié comme ça ! Enfin, je n’ai pas voulu monter en pleine nuit. J’ai attendu qu’ils aient terminé en continuant mon tricot. Un pull, pour mon chat. Avec ces températures, j’avais peur qu’il attrape froid. Gris chiné, bleu. C’est une jolie couleur, et pas trop salissante.  -…………….. ..

-Oui. Donc nous nous sommes endormis deux heures plus tard. Ils avaient fini au bout de quinze minutes, mais moi, je mets du temps à me rendormir. Le week-end suivant, et celui d’après, et celui d’encore après, ils avaient des amis à la maison. Enfin, à l’appartement, mais vous m’aviez comprise. Tous les week-ends, en fait, si je calcule bien. Oh, mais j’ai encore toute ma tête vous savez ! Et en calcul mental, nous, nous sommes efficaces ! Les jeunes ne savent rien faire sans leur calculette.
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 -Je ne pouvais quand même pas monter tous les samedis pour leur demander de faire moins de bruit ! Et je n’aime pas laisser Gaston tout seul. Il s’angoisse et il saute partout. La dernière fois, il m’avait cassé une vierge en porcelaine, offerte par Gaston, mon défunt mari, lorsque nous avions fait ce voyage, à Lourdes.

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-Comment ?

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-Oui, je leur ai téléphoné, cette fois. C’est le monsieur qui a décroché. Je lui ai dit que j’étais tombée, que je m’étais sûrement cassé quelque chose. Le col du fémur, à mon âge, on n’est pas à l’abri. Ils sont tous descendus : le mari, sa femme et deux couples d’amis. Ils m’ont aidée à me relever, ils m’ont installée dans le fauteuil, avec une couverture sur les genoux. « Bon, vous n’avez rien de cassé », m’ont-ils dit. « Allez ! Vous nous enterrerez tous ! » Ils ont ri. Ils disaient ça pour être gentils. Ils sont allés se servir un café : j’en avais préparé une grande cafetière, à l’avance. Mon défunt mari aussi aimait le café. Moi pas, ça m’empêche de dormir. Eux se sont tous endormis en quelques minutes. Il est vrai que j’avais vidé tout mon tube de somnifères : vingt-sept comprimés. Je les ai comptés. C’est à ce moment-là que j’ai fait la petite guirlande : douze oreilles. Ce n’est pas beaucoup, mais ça fait son effet. Que voulez-vous, il faut les éduquer, ces jeunes. Qui aime bien châtie bien. Il fallait qu’ils comprennent que ce n’est pas correct de casser comme ça les oreilles des voisins !

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-Un jeu, monsieur le Commissaire, pour le chat : j’ai accroché la guirlande à la porte. Vous l’auriez vu sauter pour essayer de les attraper ! C’est important qu’il fasse un peu d’exercice physique, mon Gaston !


 

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